Un certain 15 avril 2009, vers 11h du matin, au cœur du 5e arrondissement

Publié le par Zaza


Consignes d'écriture : Aller se promener 1h dans le 5e arrondissement, avec un carnet de notes. Noter des impressions, des bribes de dialogues, des choses vues. Au retour, en faire une "chronique de voyage" !

Ce matin, le quartier latin révèle son côté animal. Il y a d’abord ce chat furtif qui saute au-dessus du Menhir pour disparaître dans l’embrasure d’une fenêtre entrouverte, et laisse un profond silence. La rue est quasi déserte. Il faut dire qu’un éléphant rose bloque la rue ; sur son dos, on a tatoué Delirium Tremens. Le silence n’est que de façade. La rue va bientôt s’éveiller. Sons de trompette !

Sur les quais, c’est déjà l’effervescence : une boîte de Marlboro vide, quelques sacs qui tourbillonnent et le bruit des marteaux piqueurs. La Seine qui clapote est surveillée par des policiers géants tout sourire. Les Japonais en bateau mouche les photographient à tour de bras. C’est vrai que c’est rare les flics de 5 mètres de haut. Bientôt, l’un d’eux à taille plus raisonnable, rappelle qu’on n’est pas là pour rigoler...Un scooter gentiment garé sous un peuplier en fait les frais. Vlan, que je te colle une contredense ! Et le fonctionnaire bleu marine de poursuivre son chemin, tandis que la Seine dans la douce lumière d’avril continue de couler. Une pancarte placée au-dessus du fleuve nous avertit : « En cas d’incendie, prévenir le 0800 00 11 12. Prévenir le n° 5095 ». On a déjà vu un fleuve qui s’embrase ? En tout cas, je retiens le numéro, on ne sait jamais.


Sans m’en rendre compte, mes pas m’ont porté à la Cathédrale, elle subjugue comme à l’accoutumée. A ses pieds, le parvis est plein à craquer, les marronniers ont sorti leurs plus beaux atours, du blanc, du vert, du rose, et le parfum du buis entête. Le soleil caresse. Voilà bientôt une jeune femme, elle porte une papillon autour du cou, des astres aux oreilles et un t-shirt qui la dénude largement. Devant Notre-Dame, elle a cette charmante interrogation : « Il y a un ascenseur pour monter là-haut ? » ? Mademoiselle, le spirituel se gagne à la force des cuisses… Et puis soudain surgit ce bonze en robe rouge et or. Sur le quai Montebello, il joue les guides touristiques. Je me demande s’il est allé voir ses cousins Bernardins.


Cette interrogation en tête, je quitte Notre-Dame pour les rues étroites qui la bordent, quand soudain m’assaille une odeur de pain aux raisins, éveillant une faim irrépressible. Le resto le plus proche nous propose une assiette macrobiotique à 17,60€ : riz complet, légumes vapeurs, haricots blancs, crudités, algues Aramé, tempeh frit au soja, sauce tomate aux herbes (ben dis, c’est pas un peu cher pour du riz avec des algues et des légumes ?). En tout cas, je dois faire taire mon ventre qui crie famine, le temps d’avoir une pensée émue pour l’anatomiste Jacques Beguigne Winslow (1669-1760), né à Odense, Danemark, qui de sa pierre gravée dans la rue de la Bûcherie nous regarde silencieux. Le balayeur en vert et jaune fluo, lui, n’en a cure. Il balaye au soleil, la vie semble paisible.

Et puis au détour d’une rue, une discussion attrapée au hasard me rappelle qu’elle ne l’est pas toujours. Paisible. « Robert a eu un accident vasculaire et sa pauvre petite femme est tombée sur le poignet. Alors ils sont partis » [moi non plus, je ne serai pas restée]. La discussion médicale va bon train. « Vous rendez-vous compte ? Il y a à 80 kms de Rodez un hôpital de 400 chambres ! 400 ! C’est pour y mettre les moutons de Causse ? ». Sûrement mon bon monsieur, la Sécu s’est mise à l’heure ovine. J’y reviens d’ailleurs, à mes moutons. Le temps s’égrène, je pensais avoir oublié ma faim, quand là, à 11h15, je passe devant ce restaurant de poissons. Huîtres, coques et tourteaux m’appellent ! Mais je reste de glace et passe mon chemin. Derrière la fenêtre du resto, je vois les serveurs qui passent à table. Au menu : lasagnes bolognaises… Ce n’est pas gai !

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